Suite et fin de la cérémonie, la parole à Robert Duglé ......
Monsieur le sous-préfet, Mesdames, Messieurs,
Me voilà bien embarrassé pour répondre aux discours que je viens d’entendre ; tous me prêtent de telles qualités que si j’en pensais seulement le quart, je deviendrais un être insupportable, pétri d’orgueil et de vanité ; je mettrai donc sur le compte d’une bienveillance trop grande, d’une amitié trop indulgente, les éloges que vous avez bien voulu faire de moi et reporterais sur mes amis et collègues du Conseil municipal qui dans toutes les circonstances, ont facilité ma tâche, l’honneur de la distinction si flatteuse qui vient de m’être accordée par les pouvoirs publics, sur leur pressantes sollicitations.
Pourtant parmi les éloges qui viennent de m’être accordée, permettez-moi de retenir un titre auquel je tiens particulièrement ; celui de Républicain ; je suis républicain, l’ai toujours été et je crois bien que je mourrai dans l’impénitence finale. Je suis républicain sans alliage d’aucune sorte, et depuis plus de 40 ans que mes concitoyens ont été à même de contrôler ma vie politique on n’y relèvera pas une seule défaillance ; c’est là mon honneur d’homme et de citoyen et j’y tiens. Ce sont les principes républicains que, à la Mairie de Fécamp, mes amis et moi, nous nous sommes efforcés d’appliquer en développant le plus possible l’instruction publique pour laquelle nous sommes fiers de dire que la ville de Fécamp a dépensé près d’un million, et toutes ces lois d’assistance sociales que je suis presque tenté d’appeler des lois d’égoïsme au profit des gens fortunés, parce que toutes, elles tentent à ramener la concorde parmi les citoyens, à faire disparaître les haines de classes. Toutes ces lois nous les avons appliquées, quand nous ne les avons pas devancées, avec la plus entière impartialité, voulant toujours ignorer l’opinion des personnes qui en étaient les bénéficiaires. C’est là le secret de nos succès dans les scrutins, parce que par l’exemple que nous donnions nous avons appris à faire aimer la République et permettez-moi de le dire, c’est la meilleure manière d’être républicain, parce que en agissant ainsi nous en avons fait pénétrer les principes dans les esprits.
Dans l’un des vestibules de la mairie de Fécamp, il est une plaque de marbre où sont inscrits les noms de ceux qui furent les maires de cette ville, mon nom y figure le dernier, en attendant mon successeur. Tous ces maires se sont dévoués, j’ai le droit de le dire, à administrer de leur mieux les intérêts qui leur étaient confiés. Sur ce marbre, revit l’histoire de notre vieille cité, comme cristallisée en quelques noms plus ou moins brillants plus où moins obscurs, dont quelques-uns se perdent déjà dans l’oubli des temps, anneaux d’une chaine qui relie passé au présent. Ils ont rempli leur tâche, ils ont eu leur heure, leur utilité ; de cela il faut les remercier, et puisque je suis le dernier venu, je vous demanderai d’adresser un souvenir reconnaissant à mes prédécesseurs, aux anciens maires de Fécamp.
Ce devoir rempli, je reviens avec plaisir aux vivants.
Comment exprimer ma gratitude aux pouvoirs publics représentés par notre sympathique sous-préfet ; à notre dévoué député, M. Georges Bureau dont on ne compte plus les services rendus dans toute sa circonscription ; à mes adjoints et amis du Conseil municipal qui, avec un dévouement sans bornes, ont organisé ce banquet et la souscription dont le résultat est ce magnifique objet d’art qui m’est offert ; à mes amis et collègues les maires du canton qui suivant l’exemple du Conseil municipal de Fécamp, m’ont offert une croix ; à ceux qui ont été à la mairie mes fidèles collaborateurs et qui ayant été à la peine, doivent être aussi à l’honneur ; comment remercier enfin, tous les amis, si nombreux que je vois ici, et qui sont venus me témoigner leur vibrante reconnaissance.
À tous du fond du cœur je crie merci, merci et encore merci ! Je lève mon verre en votre honneur à tous et bois à la ville de Fécamp et à la République !
Un triple ban est alors battu en l’honneur du maire de Fécamp, à qui la salle fait une véritable ovation. Et c’est sous cette chaude manifestation que se termina le plus heureusement cette belle fête de la grande famille républicaine. F. Polet Le Petit Havre 23 février 1914