FÉCAMP FESTIF - les GRANDS ÉVÉNEMENTS
Page créée le 03.08.2015 - modifiée le 28 mars 2017
 

    Journal de Rouen : 5 août 1889
 

LES FÊTES DE FÉCAMP

     Inauguration des Ecoles et du Nouveau Service d’Eau
 

     (De notre envoyé spécial) - Fécamp, 4 août.


     Les fêtes se succèdent aux fêtes dans cette jolie ville de Fécamp animée, en ce moment, par une foule de baigneurs en villégiature, venant chercher le calme au bord de la mer qui déferle sur les galets, dans le vallon de Renneville et sur les flancs des falaises. Il y a quelques jours, c’était le comice agricole de l’arrondissement qui y tenait ce qu’il est convenu d’appeler “ses paisibles assises” ; aujourd’hui, au milieu d’une véritable affluence de curieux accourus de tous côtés, on y fêtait l’inauguration de nouvelles écoles, en même temps que celle d’une partie du service des eaux. On avait parait-il, convié à ces fêtes le ministre de l’instruction publique ; mais d’autres devoirs le retenaient, croyons-nous à Paris, et c’est à notre dévoué préfet, M. Hendle, qu’est revenue la présidence officielle de cette double cérémonie.


     Aussitôt arrivé à Fécamp, M. le préfet s’est rendu à l’hospice de la ville accompagné des membres de la commission et de la municipalité. Après avoir visité les salles, il a remis à Mme Deneuve (sœur Saint-Pierre), une médaille d’honneur au nom du département. Cette distinction qui avait été demandée par toute la commission des hospices, était des plus justes et des plus méritées. Voilà en effet cinquante-six ans que la digne sœur Saint-Pierre prodigue ses soins dévoués aux malades et aux infirmes. Le gouvernement de la République, qui sait reconnaître tous les dévouements, s’est hautement honoré en décernant cette médaille à cette digne servante des malheureux.


      Dès deux heures et demie, le cortège officiel, au bruit des salves d’artillerie éclatant de toutes parts, se réunit à l’Hôtel-de-Ville ; parmi les autorités présentes nous remarquons MM. Le Borgne, maire de la ville de Fécamp ; Avisse et Avenel, adjoints ; Delaunay, conseiller général ; M. le sénateur Boulanger, Becheman, ingénieur, l’un des créateurs des fontaines lumineuses à Paris, ancien ingénieur du port de Fécamp ; Guéret, adjoint au maire de Rouen ; Bret, secrétaire général ; Laroche, sous-préfet de l’arrondissement ; Melivier, inspecteur d’académie ; Launay, inspecteur primaire ; Renault, chef de division ; Lebaillif, maire des Loges conseiller d’arrondissement ; Boissaye, maire d’Etretat ; Milon, conseiller municipal ; Lecourt, capitaine des pompiers ; Fremont, capitaine des douanes. Par la rue Jacques-Huet, par la place St-Etienne, la rue Saint-Etienne et la rue Gustave Lambert, nous rappelle celui du vaillant explorateur au Pôle-Nord qui a longtemps habité Fécamp, on arrive précédé de la musique des enfants de Fécamp, qui nous prodigue ses pas redoublés les plus alertes, et de la compagnie des sapeurs-pompiers, jusqu’à l’École du Port qu’on doit inaugurer.

 

L'ÉCOLE DU PORT

 

     La construction des écoles nouvelles faisant place aux anciens bâtiments, des écoles communales, est certes, tout à l’honneur de l’architecte municipal, M. Albert, qui a su montrer dans l’ordonnance et l’aménagement intérieur de ces édifices, un goût et un art remarquables. Par les différentes constructions qu’il a élevées à Fécamp, et principalement par les travaux importants qu’il a conduits à bien, particulièrement la très jolie maison du XVIe siècle appartenant à M. Le Grand, nous savions quel était le talent solide et sérieux de M. Albert, l’architecte des nouvelles constructions.


     L’école du port répond à tous les besoins et à toutes les nécessités de l’école moderne, telles qu’elle a été comprise par les nouveaux programmes universitaires. Elle se compose d’un grand corps de bâtiment, en façade sur la rue Gustave-Lambert, composé d’un pavillon central relié à deux pavillons d’angle à droite et à gauche par deux bâtiments à un seul étage.

     Cette construction en briques et silex est bien disposée ; la cour fort large qui s’étant derrière donnant sur la côte qui parcourt la route de Fécamp à Yport, est bornée sur les côtés par des préaux couverts au-dessus desquels on aperçoit les campaniles et les flèches de la Bénédictine. M. le préfet parcourt les classes, interrogeant les élèves, prenant des informations sur ceux qui ont acquis leur certificat d’études primaires, partout acclamé par les cris répétés de : Vive le préfet ! vive la république !

      Il félicite les maitres et les directeurs des écoles de la ville, MM. Ternisien et Bouillon, qui prodiguent leurs soins à la jeunesse fécampoise.


     Ces diverses constructions ont été faites par M. Touzet, entrepreneur pour ma maçonnerie, M. Limare pour la menuiserie, et M. Savary, de Quimperlé pour la menuiserie scolaire.
 

LA FONTAINE DE LA PLACE THIERS

 

     Le cortège se remet ensuite en marche par les rues Théagène-Boufart, aux Juifs et s’arrête sur la place Thiers, décorée de mats vénitiens où flottent des oriflammes tricolores ; au milieu a été construit un vaste bassin qu’orne un rocher en staff d’où va s’élancer, dans quelques instants, un jet d’eau. M. le préfet s’avance et tourne une clé ornée de rubans tricolores, et aussitôt jaillissent de tous côtés des colonnes d’eau qui s’élèvent dans les airs. Le constructeur de ce rocher, M. Ponchot, qui s’intitule rocailliste-cimentier, a prodigué ses inventions les plus ingénieuses. Il y a là un boa constrictor, un crocodile, des tortues, des animaux étranges qui, tous, projettent au loin des jets humides sur la foule qui entoure la place. Tout cela n’empêche point la Société la mouette de procéder au lâcher d’une centaine de pigeons voyageurs qui prennent aussitôt leur vol.

     À peine le soleil, qui joue derrière les nuages, a-t-il séché les gouttelettes que la gerbe d’eau s’élançant dans les airs a projeté sur les habits officiels, que nous voilà arrivés, en remontant et en descendant les rues accidentées du vieux Fécamp, sur la place de l’Hôtel-de-Ville. Caché par les arbres du jardin de la maison commune et se dissimulant un peu derrière l’abside dentelée de l’église de l’abbaye, c’est là que se trouve le second groupe scolaire de la ville de Fécamp.

 

L'ÉCOLE DE L'HÔTEL-DE-VILLE

 
     La nouvelle école de l’Hôtel-de-Ville n’est pas moins bien comprise que l’école du Nord. Construite dans un terrain en contre-bas, appartenant autrefois à M. Daviron et qui a dû être remblayé en grande partie, elle comporte un seul corps de bâtiment à trois étages surélevés de plusieurs marches. A l’extérieur un pavillon central, formant un léger avant-corps, relié à des pavillons d’angles, accuse l’ordonnancement générale habilement disposée : l’aspect de la façade, avec des dispositions alternées de briques blanches et roses et de silex noir qui rappellent l’ancienne mode de construction des pays voisins de la mer, est des plus heureux et des plus agréable. Sur la façade une plaque porte les dates de construction et d’inauguration. Elle est conçue dans les termes suivant :


     Cette école a été édifiée sous l’administration de M. A. Le Borgne, maire ; F. Avenel, J. Avisse, adjoints ; d’après les plan de M. C. Albert, architecte de la ville et inaugurée par M. Hendle, préfet le 4 août 1889.

 

     On accède dans l’intérieur par deux portes élevées de quelques marches situées dans les pavillons d’angles : le rez-de-chaussée comprend quatre classes très bien éclairées par de grands châssis vitrés et meublées de tous les accessoires scolaires : bancs, tables, chaises, tableaux noirs, pancartes qui serviront certainement à propager auprès des élèves l’instruction par l’aspect ; un large corridor court tout le long de ce corps de bâtiment et donne accès dans toutes les classes. Vers le centre, est placé le cabinet de l’instituteur en chef, qui par sa situation même, peut se rendre compte de l’organisation de toutes les classes et surveiller tous les mouvements des élèves ; il peut également exercer sa surveillance sur les deux escaliers placés aux deux pavillons d’angle et conduisant au premier étage, où sont installées deux classes et les appartements de l’instituteur en chef. Ceux des instituteurs adjoints sont placés au second étage.


     Derrière ce corps de bâtiment, très solidement construit, et fort ingénieusement aménagé, on trouve une cour de récréation qui manque un peu d’étendue : un préau couvert, placé en contrebas sous le bâtiment principal, qui abrite les élèves les jours de mauvais temps.

Ces écoles, au nombre de trois, ont couté tant pour leur construction que pour l’achat des terrains et leur aménagement, la somme de 296 000 francs fournis en partie par un emprunt fait par la ville de Fécamp.

 

Source : Archives départementales de la Seine-Maritime