Enfin les chars, rangés rue Arquaise et route de Rouen se mirent en branle, pendant que les officiels et la police, placée sous la direction de M. Galissard adjoint de M. Favey, et de M. Colliaux, brigadier, s’employaient à la bonne formation du cortège.
En tête venaient, comme déjà noté, Maître Devaux, répondant aux saluts du public par de grands coups de chapeau à droite et à gauche, puis la voiture des commissaires, où avaient pris place M. Galissard et M. Lanquetuit, le zélé commissaire de la fête.
Suivait la Fanfare municipale d’Yvetot, jouant “Le Bataillon de fer”, de A. Arnoux, puis la voiture de M. Ch. Merrienne et de M. H. Pain, membres du comité d’organisation et du bureau de la Société Commerciale des Fêtes.
Un jeune vendeur, entièrement vêtu de blanc et coiffé d’un chapeau haut de forme “plaçait” des pochette-surprise avec un entrain remarquable. Venait alors une automobile dans laquelle avaient pris place MM. Lorieul, Lebrun et Désert, immédiatement suivie du premier char, celui des Gars de la marine (construit par M. Argentin), représentant un bateau à vapeur fort bien réussi, portant en poupe l’inscription “Grégaou” Fécamp. Ce char très couleur locale, était monté par de jeunes garçons et fillettes, tous et toutes très gracieux dans leur costume de marin et coiffés de bérets rappelant les noms de nos grands transatlantiques Normandie, Paris, etc… Chacun tendait vers la foule un léger filet de pêche… aux “gros sous.
Le char qui suivait rappelait, lui aussi, le quartier du Port, puisqu’il s’intitulait La Marée fleurie et qu’il était composé d’une barque des Etablissements Argentin, artistiquement décorée et garnie de nombreux petits matelots comme pour le précédent.
La Famille Mickey amusa beaucoup le public. Dans une voiturette, qu’avait préparée également M. Argentin, et que tirait un brave petit âne, deux enfants aux yeux noirs et au minois éveillé, déguisés en souris, imitaient à la perfection le légendaire Mickey de M. Walt Disney.
Aux alentours, vendeurs et vendeuses offraient l’indispensable petit fétiche, en criant : “Qui n’a pas son Mickey ?”
Le Char Colonial, dû à la patience de M. Avenel, était bondé d’enfants aux costumes de couleurs vives et coiffés à la mode de la France d’outre-mer. Les tambourins qu’on avait eu garde d’oublier, retentissaient sous le martèlement des petits poings nerveux et joyeux. Les blancs musiciens de la fanfare de Graville lançaient pour leur part des flots… d’harmonie.
On pouvait alors admirer une fort jolie petite automobile fleurie, derrière laquelle était élevé un puits miniature, garni de mousse. Elle était pilotée par la fillette de M. Jacques Levicq.
Le Char des Capucines avait certainement exigé une forte dose de patience ! Construit par M. Pimont, d’après les dessins de M. Laperdix, il était entièrement recouvert de capucines, tombant en cascades. Ces fleurs étaient, si l’on peut dire, le fruit d’un long travail effectué par M. Faucon et le Personnel du Magasin Universel. A l’avant, s’élevait un puits en fer forgé, très artistique, dû au talent d’un habile artisan, M. Fouquer, serrurier. Et là aussi, de nombreux enfants apportaient en abondance la grâce, la vie, la joie.
Derrière ce char, une voiture automobile garnie, de chaque côté, d’un large panneau, indiquait qu’il était possible de gagner 300 000 francs en achetant des pochettes surprises. Dans cette voiture, on livrait les pochettes… en gros. C’était le ravitaillement de toutes les charmantes vendeuses, qui, le long du cortège, sollicitaient si gracieusement la générosité des curieux.
Le Grand Méchant Loup, malgré son aspect terrible, ne paraissait nullement intimider les trois petits cochons livrés à sa férocité. Le char très réussi, était l’œuvre de M. Vauchel. Il amusa beaucoup sur son passage.
Le Char des Pierrots, construit par M. Savalle et décoré par M. Jean Laperdrix, était remarquable de fraîcheur et de bon goût, tant par sa composition que par la quantité des petits pierrots juchés dessus.
Précédant le deuxième groupe du cortège marchait au pas et la tête haute, tout une petite troupe de jeunes soldats habillés de rouge, et dont le rassemblement avait été prévu et organisé sur la propre initiative du Président de la Société des Fêtes, le toujours dévoué M. Jouette. Disons que Mme la Présidente fut aussi pour beaucoup dans la mise sur pied de ce magnifique bataillon.
Tout en rose, le char créé sur les données de Mme Jouette, était un petit chef-d’œuvre de fraîcheur qui émerveillait. Il fut très applaudi, ainsi que sa charmante “chauffeuse” Il était suivi d’une automobile décorée, dans laquelle se tenaient MM. Jouette, Pencaldi et Mail, du Comité Général.
La Lyre maritime de Fécamp, sous la direction de M. Lacorne et la clique conduite par M. Vaillant faisaient entendre, comme toujours, et avec un entrain endiablé, les airs les plus plaisants de leur répertoire précédant le groupe de l’Hôtel-de-Ville, représenté par M. Vaquin et Madame, ainsi que par MM Koënig, Lefebvre, Mutel, dont les voitures étaient agréablement fleuries de roses, de bleuets et de pois de senteur.
Nounou en promenade déchainait les rires. C’était Mlle Geneviève Delauné poussant une petite voiture de bébé (une forte jolie poupée) et accompagnée d’un soldat en uniforme d’avant-guerre, Michel Delauné, tous deux fort amusants et qui furent très applaudis. Cette voiture était gracieusement fleurie par M. Caumont horticulteur.
On ne saurait dire le nombre d’amateurs qui firent poser les “amoureux” devant l’objectif ! Ils étaient suivis d’une automobile fleurie, dans laquelle M. et Mme Delauné.
Le berceau d’été, construit par M. Argentin et décoré de papillons par M. Caty, transportait d’élégantes fillettes fleuries de pâquerettes qui lançaient dans la foule ravie une pluie de petites fleurs. Notons que le Berceau de l’Eté n’a pas demandé moins de 17 000 pâquerettes, que le Vice-Président de la Société d’Horticulture, M. A. Vaquin, sut grouper avec l’art que l’on devine.
Immédiatement après, suivait l’automobile de M. Mutel et de Melle Adam, puis la musique de Goderville, toujours aussi allante et gaie. Au milieu du groupe de l’Hôtel-de-Ville, le sympathique et toujours dévoué “papa Adam” se montrait un ordonnateur parfait et veillait sur nos jeunes générations.
Venait alors une Victoria, transportant MM. Jillet, Granger, et Palfray, précédant le premier char des Halletes, construit par M. et Mme Delamare et MM. Lefebvre e Féron, sur une voiture prêtée par M. Allais : C’est ici qu’on “Hallette”, décoré d’un énorme biberon, cependant que sur le capot de l’automobile était juché une petite voiture de bébé. Et de là, on débitait des biberons en quantité fantastique. Tout le monde voulait … haleter
La Pergola Normande, par ses vastes proportions, donnait abri à une nombreuse jeunesse sous un amas de fleurs. Elle était l’œuvre de M. Acher, pour la construction, et de M. Levicq et ses employés, pour l’ornementation.
C’était ensuite le tour de Maître Aliboron, un brave âne parmi les plus doux, prêté par la maison Ballandonne, portant dans un bât, deux petits pouparts, et confiés à la surveillance attentive de Jeanne et Roland Lemonnier et André Tesnières.
La Victoria de Mme Levicq, qui suivait, fut fort remarquée par le goût et la perfection de sa décoration. Ce n’étaient que des fleurs naturelles. Venait ensuite, un char évocateur de notre bonne Normandie :
Sous les Pommiers en fleurs, qui nous ramenaient aux temps de mai, invinciblement. Construction de la Société des habitations à bon marché, et décors de M. et Mme Levicq.
L’Actualité aux Hauts-Camps était composée d’un immeuble dont une façade représentait une habitation de la rue Léon Dufour et l’autre, une des Hauts-Camps. Les membres du comité avaient réussi sur le camion de M. Fouquay, un tableau très rassemblant.
Enfin, terminant la marche, venaient les vainqueurs du Sweepstake, les chevaux Crudité et Will of Valence. Ils étaient entourés de quelques “gugusses” très amusants.
Inutile de dire que sur tout le parcours, l’affluence des curieux était énorme. Partout, l’on se pressait, l’on se compressait pour admirer les chars. Pour rien au monde, on aurait cédé un pouce du terrain patiemment conquis. Les fenêtres des immeubles étaient envahies, les trottoirs pris d’assaut.
Pendant l’arrêt, place Thiers, Maître Devaux, qui lui, se trouvait déjà rue Félix-Faure, se permit quelques fantaisies de caracole, qui eurent leur petit succès.